Le retour de la fin

De retour après une pause soleil qui s’est, bien sûr, ingénié à se généraliser sur toute la France mais,  pas avec autant de brio superfétatoire, de générosité compassionnelle et de luminosité clairvoyante, que sur les lieux qui ont eu l’insigne honneur de recevoir l’empreinte de ma condescendante foulée.

J’organise d’ailleurs une projection privée de sens, le week end prochain, au bénéfice de l’association des marcheurs anonymes (ceux qui ne peuvent s’empêcher de raconter des bobards, pour garnir une vie sempiternellement identique à ce qu’on ne voit jamais à la télévision) : pour la modique somme de 18,99 euros (un centime peut être laissé en pourboire au serveur qui me sert d’ordinateur), vous pourrez ainsi apercevoir une beauté diaphane et une créature régime-moiteur s’acharnaient à passer de p.. bonnes vacances avec des mioches impossibles à détacher de leurs DS. Le film dure entre 2 mn et 1 heure, selon que la beauté diaphane aura digéré son complexe du maillot ou non (ce complexe consiste à ne pas croire que des poils puissent dépasser alors qu’on ne veut pas les voir), le son risquant d’être perturbé par la Chose demis-rougeâtre déclamant sans interruption (sauf de la part de la beauté diaphane qui lui demande de fermer le réfrigérateur) : « on ne peut pas être et avoir été« , sur un ton de baleine échoué après un trip avec un sac en plastique.

De retour donc, de notre périple annuel au bord de l’océan qui s’est, bien sûr, ingénié à recevoir d’autres baigneurs, suffisamment mesquins pour songer que les vagues leur étaient destinées, alors que j’aurai pu les détromper, sans les détremper, en leur apprenant que, sans moi, il n’y aurait jamais eu de visio-connaissance de l’élément primordial, car pour savoir il faut être quelque part, pour rapporter il faut être parti et pour mentir il faut être dans le vrai.

De retour donc des profondeurs de ma pensée, qui se sont bien sûr ingéniées à me faire passer pour un aller sans retour, je m’en vais vous raconter quelques réflexions croustillantes, moins crissantes cependant que ce sable qui se perpétue le long des flancs marins, jusqu’à s’immiscer dans l’intimité de vos draps et celui qui chante l’amour à la plage a certainement une passion pour les tampons jex.

Les vacances sont un moyen privilégié pour les parents de resserrer les liens avec leurs enfants, liens distendus du fait des confrontations journalières lors des diners où chacun s’envoie le sel en pleine poire (« arrêtes avec le sel, tu vas faire de l’hypertension et t’écrouler comme un pickashu en mal de paroles », « je sale  parce que c’est ma vie et que j’préfère être hypertendu que ridé comme toi », « le sel c’est pas bien, même que le capitaine superbiotop, il va te creuver les veines », « ouais, mais j’ai lu sur madofshow que si tu prends 15 grammes de sel chaque soir de pleine lune, tu augmente tes chances d’avoir un garçon », « c’est très bon, ma chérie, mais il manque un peu de sel« ). Pendant les vacances, vous partagez TOUS vos repas avec vos enfants, et cela permet de relativiser le reste de l’année.

Cloitrés dans un mobil-home, cernés par l’absence de télévision ou s’étant promis de n’allumer l’écran disponible qu’en cas d’averse rabat-joie (ou de père incapable de se sevrer de télécommande), les parents ressortent les promenades et les jeux de société. Pour ces derniers, deux tactiques selon que vous souhaitez prolonger ce moment privilégié ou non : 1) oui : faire tout le contraire de ce que votre confrontation avec le monde professionnel vous a enseignée : partager et accepter de n’être pas le meilleur (bien que cette attitude peut correspondre à votre flagornerie servile quand vous souhaitez obtenir une petite reconnaissance de votre patron) ; 2) non : profiter d’un monopoly pour réviser les additions et soustractions et vous vous retrouverez  rapidement à profiter paisiblement d’un bon livre, pendant que votre fils tape dans tout ce qu’il trouve pour sortir de son crâne la moindre trace de culture.

Pour ce qui concerne les promenades, les parents peuvent louer de superbes vélos et laisser les enfants vagabonder dans le camping, rassurés par le fait qu’il n’est rempli que de britanniques qui, on le sait, ne sont pas pervers puisqu’ils roulent à gauche (les statistiques prouvent que la grande  majorité des crimes sexuels sont commis par des gens roulant à droite et, circonstances aggravantes, avec un volant en cuir). Ou les amener à l’aire de jeux, où chacun pourra s’adonner à son activité préférée : les adultes, comparer les prouesses de leurs enfants, se félicitant même quand leur fils atteint la plus haute barre pour s’y maintenir en équilibre sur la tête, jusqu’à ce que l’instinct de mère se réveille et lui conjure de descendre tout de suite, il va salir son short licence Batman et Robin se marient enfin ; les enfants, comparer leurs âges.

Vous l’avez certainement constaté, la première chose que deux enfants, qui se rencontrent, échangent, c’est leur âge (jusqu’à un certain âge, après c’est leur Mii, ensuite leur pseudo skype et encore après, leurs bons coups). Cela peut être ennuyeux quand un adulte est impliqué dans le processus. Illustration : des enfants jouent au tourniquet, ils s’apprivoisent rapidement ,se reniflent leur âge et essayent de bouger la grande toupie qui se révèle plus dure que prévue pour leurs bras. Un adulte, compatissant à montrer ses muscles entretenus à l’aide de barre Mars, s’approche et pousse pour la plus grande satisfaction des enfants, qui gardent toujours une certaine nostalgie de leur première poussette, où ils étaient benoitement secoués par les nombreux écueils jonchant les trottoirs, maintenant envahis par la poussée écologique et la pédale économique, les piétons n’ayant plus qu’à prier pour être écrasé par un cycliste plutôt que par un automobiliste. Et là, surgit la question qui creuse le front : « t’as quel âge ? ». Autant un bambin de 6 ans s’émerveille à écarquiller les doigts pour montrer sa grandeur d’âme, autant un adulte peine à cracher ce que ses poumons ont inhalés depuis son premier pic de pollution. Doit-il révéler qu’il a 40 ans, alors qu’il rêve de n’en apparâitre que 36 et que ces congénères, qui l’observent en attendant qu’il tombe dans le piège, s’apprêtent à dégainer le « il fait plus vieux« ? Il le dit, la terre ne tremble pas et pourtant il sent son piédestal s’écrouler. Il va se rasseoir sur un banc en se plaignant d’un fort mal de dos.

Les parents, dignes de ce nom, sont toujours accompagnés d’un accessoire indispensable : un appareil photo. Peu importe que l’enfant s’amuse, en fait, il faut qu’il existe des photographies construisant sa descente de toboggan, sa chute de la balançoire, sa baignade dans la mer, son premier baiser à une voisine de mobil-home, son premier cochon, sa dernière bêtise du jour. Si pas de photos, pas de souvenirs. Ainsi vous amenez vos enfants dans un parc d’attraction et là, vous vous effondrez lorsque l’appareil photo,  que vous ne sollicitiez que pour la trente et unième fois, vous répond « PLUS DE BATTERIE« . Oh non, les sourires de mes enfants ne pourront plus être partagés avec mes amis facebookiens ; plus de clichés pour attester que le bonheur existe et que sony l’a fait. La fête est finie, les enfants ! on rentre… le plaisir est photogénique ou n’est pas.

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Comment taire une punition

Les vacances, c’est l’occasion de faire ce qu’on ne fait pas d’habitude : supporter les enfants.

Surtout quand on a eu l’idée folle de les punir, pour je ne sais quelle futile raison qui, après réflexion, ne méritait pas un tel supplice : les priver de télévision.

Mon mari et moi regardons en alternance l’écran noir silencieux et l’aiguille qui tourne, si lentement, dans son écrin inamovible. Ne pas céder surtout, pour garder une crédibilité déjà bien entamée, le jour où nous avons dû avouer que c’était nous qui faisions les paquets cadeaux et non le père noël, ce dont ils se doutaient depuis longtemps, ne pouvant croire que le grand saint homme rouge puisse faire preuve de tant d’amateurisme et d’imperfection. Alors que de nous, ils attendent si peu, préférant se réfugier dans un monde virtuel où les parents rient à leur blague.

Il va falloir ressortir les jeux de société, la pâte à modeler, les idées, déterrer l’énergie annihilée par des années de vautrage de canapé, retrouver ses pupilles, dilatées par des scénaristes qui ne savent pas ce qu’un quotidien signifie.

Ce matin, j’ai donc été la serveuse du grand restaurant « A la vôtre » ayant eu l’honneur de servir des hamburgers et du poisson riz à une maîtresse et ses élèves (entre autres, Idéfix et Porcinet), qui ont dû payer une addition faramineuse de 10 centimes. Je pourrais profiter de cette pause »imagination » pour faire comprendre la valeur de l’argent à mes enfants, mais je crains de ne pas savoir évaluer « Mes copines ont en tous un  » et « Le professeur a dit que c’était obligatoire » : cela coûte beaucoup de palabres inutiles.

Cet après midi, c’est mon mari qui s’est plongé, avec ravissement, dans son maillot de bain qui fait tellement si bien ressortir sa magnifique silhouette hitchcockienne (le suspens résidant dans la solidité du tissu) pour les sortir et les faire s’immerger dans une piscine noire d’enfants, qui n’ont pas eu besoin de punitions pour mariner dans le bouillon (à croire qu’il existe  des parents qui savent comment chlore une discussion). Je dispose donc de quelques minutes de répit (le temps que mon mari explose, soit son maillot, soit son quota de patience) pour ne pas réfléchir à quelle bétification je vais être vouée.

Et je voudrais en profiter pour m’étaler, sans prétention scientifique, sur un sujet qui m’a semblé d’importance quand j’ai vu, sur la toile, un grand gaillard, doté d’une sensibilité exécerbée par la recherche du temps de parole, s’interrogeait sur la pertinence de répondre ou non à un commentaire, balançant entre la modestie, la politesse et le  de toute façon, c’est bourré de faute d’orthographes. Son questionnement était suivi d’un vaste débat, alliant la pondération et le savoir- vivre, entre quatre internautes argumentant majoritairement pour « laisse-moi un commentaire et je promets je te répondrai ».

J’aimerai apporter ma contribution, de mon côté évidemment, ne souhaitant pas susciter des commentaires que la bienséance m’obligeraient à effacer.

Premièrement, car tout bon développement doit débuter par un premièr argument, qui est rarement le plus convaincant, mais qui a pour principale qualité de surgir en premier de la glande pinéale, siège des humeurs et de la propension à parler avant que quelqu’un ne le fasse à sa place : pour répondre à un commentaire, il faut déjà que quelqu’un soit tombé sur votre page et s’y soit arrêté suffisamment pour avoir envie d’y laisser une trace écrite , d’y réfléchir suffisamment pour en juger la teneur publiable, de consentir ainsi  à vous faire connaître son jugement et vous inviter à entrer dans son espace au risque de vous écraser de sa supériorité. Celui qui n’a jamais reçu de commentaire est donc rassuré : il n’a pas à répondre à quelqu’un qui n’a pas jugé bon de lui dire qu’il trouvait son style super, ses mots super bien choisis et sa présentation super bien écrite – « lucaslesonpendant », site super marrant.

Par contre, le dilemme surgit pour celui qui découvre, un jour où il n’attendait plus rien, sauf, avec appréhension, la prochaine facture d’électricité, qu’un louisleserrurier lui a laissé un message fort approprié sous un billet relatif au « retour des maisons closes ». Doit-il snober ce message d’amitié au risque de passer à côté de quelqu’un de très utile, quand sa copine aura changer tous les loquets de la maison après s’être appropriée toute sa collection de vynils super rares, ou doit-il lui répondre au risque de s’ennuyer dix secondes à lire un article comparant les qualités de la clef à solive et la clef à tourneur ?

Donc, deuxièmement (j’aime montrer qu’il existe une progression dans ce qui semble une improvisation, mais est en fait un judicieux essai sur la condition à mettre en bouteille un pari qui ne m’a rien coûté), pour répondre à un commentaire, il faut que ce commentaire suscite une réponse.

Si le commentaire se contente de réciter un passage de la bible, en exhortant les chrétiens à se rebeller contre Sodome et Gorgonzola, un amène ta statistique suffit amplement. Si le commentaire par compte semble sincère (ce qui peut susciter une interrogation sur le comment reconnaître un commentaire sincère. 1) s’il n’est pas trop dythirambique (surtout si vous évoquiez la mort de votre chat) ; 2) s’il n’émet pas d’un blog saturé de photos de chats (tenu par quelqu’un qui est, en plus, certainement, contre les tests en laboratoire ! pauvres bêtes…) ; 3) s’il ne répond pas à un de vos commentaires, le type s’étant senti obligé, par politesse ou temps libre, de vous remercier de l’avoir distingué.), vous pouvez vous donner la peine, soit de répondre, sur votre site, à la suite du commentaire, ce qui oblige le gars à revenir sur votre site, pour lire votre réponse, s’il se souvient qu’il vous a laissé un commentaire et qu’il ne vous en veuille pas de lui répondre, sur votre site, au lieu d’aller sur le sien, alors que c’était son objectif pour gagner un lecteur de plus, soit de répondre sur son site, parce qu’après tout vous aimez bien vous marrer et que lire des conneries qui ne valent pas les votres vous réjouit toujours.

Et troisièmement, parce que vous êtes quelqu’un qui aime les surprises et créer des amitiés impossibles, vous allez répondre à ce punaise de commentaire, découvrir un site super original et quelqu’un de passionnant qui vous apprendra comment faire des macramés avec des vermicelles.

Alors, répondre ou non à un commentaire, c’est comme tu veux mon gars, mais si tu pouvais m’en laisser un, qui m’explique comment survivre à une semaine sans télévision, n’hésites pas et si je te réponds c’est que ton conseil a marché.

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Trois à la courte paille

Chez nous, ils savent p’tet planter les choux, mais ils sont surtout partout. Les agriculteurs.

Ils sèment, ils moissonnent, ils stabulisent, ils traient si peu, ils cassent des œufs, ils cherchent l’amour dans le pré. Ils modulent le paysage, renâclent devant les haies, fauchent les arbres et les obstacles pour quelques millions de panneaux solaires. Ils vendent, ils achètent, faisant à eux-seuls le marché de l’immobilier, se pavanent en 4/4 rutilants, se plaignent qu’il pleut, qu’il fasse trop sec, ne sortent les bêtes qu’au moment où votre voiture passe, couchent parfois avec les poules. Ils prennent l’accent tranquille, nous caricaturisent à bord de leurs sabots, nous couvre de bouses et d’une aura de sauvage bonhommie, alors qu’ils ont ouverts quinze succursales grâce à internet. Ils dominent, quoi ! Et pourtant, punaise, leur tracteur n’est même pas capable de dépasser les 25 km/h.

Trois, ils étaient trois devant moi. Immenses, lourds de vrombissements et de certitudes, trainant chacun une énorme remorque chargée à bourriques de bottes de paille, ils avançaient vers on ne sait quel destin, mais un qu’était trop prés du mien.

Un bus pesant, mais débordant seulement de l’impatience de quelques passagers, avait adopté une attitude de soumission et paissait tranquillement derrière ces mastodontes, attendant qu’ils bifurquent enfin, pour s’élancer vers son prochain arrêt.

Je suivais également, docilement, vaincue par leur arrogance à s’arroger des champs de plus en plus éloignés de leur douce chaumière où les attendrait une ferme fermière prête à leur passer un savon, parce qu’ils avaient dépasser la date limite pour obtenir la subvention n°7548.

Un mercenaire, au volant d’un intrépide véhicule toute option sauf de la prudence, tenta par sabordage de doubler, à l’aide de ses chevaux puissants et de son bon droit à dépasser tout ce qui entravait son terrain de jeu, les trois Goliath. Mais contrairement à la légende, il dut se rabattre à peine le premier englouti, à cause de la sournoiserie des routes de campagne qui ,soit sont torves en dépit de toute visibilité, soit sont courbes en délit de ronds points _ ce qui permet aux ivrognes qui parsèment nos bas-côtés de  s’échouer de temps en temps en terrains de meilleure compagnie : les terre-pleins.

Pensez-vous que rouler à 25 km/h (trente dans les descentes pleines de hoquets) permet de mieux profiter du paysage ?

Oui, si vous surmontez la panique qui prend peu à peu possession de votre corps à la pensée soudaine qui emplit votre cerveau, lui qui est habitué à s’écraser sous la vitesse, seulement obnubilé par l’envie irrépressible d’arriver, ne serait-ce que chez votre belle-mère, où au moins, durant le calvaire de votre visite, vous pourrez vous réfugier dans le réconfort enfantin d’avoir encore battu le record de la distance, et sans soufflage illicite.

Je roule à 25 km/h et mes neurones se décrispent. Mes yeux quittent le compteur et osent se poser sur le vol d’un oiseau dont j’ignore le genre et que je baptise buse, parce que ça ne ressemble pas à une corneille, que j’appelle d’ailleurs corbeau, parce que du moment que c’est doté de plumes noirs, d’un aspect repoussant et que ça picore dans les prés sous l’œil goguenard d’épouvantails dépoitraillés, je sais que cela ne peut pas être un bon cygne.

Les tracteurs ne veulent pas me lâcher, alors j’apprécie la vue : au moins 10 000 euros si prise par un bon photographe. Les nuages sont bas, en relief pour certains, la perspective est lumineuse et pas d’avions pour dater mon impression d’être dans un archaïsme ravissant mon temps.  Je devine ici un éléphant, là un taureau discutant avec un hippopotame. Aucun stratus ne dessine un mouton et pourtant j’exuspère. Ce n’est pas Mozart qu’il fallait assassiner, mais l’inventeur de l’engin capable de transporter le mur du son.

Il pleut, j’actionne les essuie-glaces : ils vont plus vite que moi. Je m’imagine à leur place et je frémis sous cette vitesse soudaine. Je reviens derrière mon volant, qui mérite mal son nom quant il ne peut me soulever loin de ce défilé qui mise sur la paille. Je ne peux bien sûr pas ronger mes freins au moment où je n’arrête pas de les solliciter, alors je regarde, dans le rétroviseur, la file de voitures coincées derrière moi et j’ai une soudaine envie d’escargots à l’ail.

Vous ne connaissiez bien sûr pas l’histoire de cheveux raides et les trois tracteurs, mais je peux vous dire qu’aucun siège n’a été molesté et que cheveux raides s’en est retourné chez elle, saine et sauve, se promettant à l’avenir de ne pas se marier avec un campagnard.

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Silence, on vous écoute

 

Ce qui m’étonne, c’est que des gens s’étonnent qu’on puisse s’étonner de découvrir l’ampleur de l’espionnage internétien pratiqué par les Etats-Unis.

Pour eux, tout le monde s’en doutait depuis longtemps et ce ne sont pas des preuves formelles qui vont ébranler leur joug face à la fatalité de cette violation de leur intimité. Ils acceptent que des individus indéterminés, soit-disant animés par la meilleure volonté, fouillent dans leur intimité pour découvrir s’ils sont de dangereux terroristes ou juste des fétichistes de la chaussure Sarenza.

Qu’ils puissent le faire sans contrôle, sans justification ne les dérange pas, puisque les gens doivent être conscients qu’ils sont observés. Il est donc plus choquant d’être choqué par ces pratiques, que les pratiques elles-mêmes, puisque l’on n’a rien à craindre si l’on n’a rien à se faire reprocher.

Sauf que, qui définit ce qui est reprochable ou non ? Peut être que pour un américain, le fait de commander une pizza hallal est un signal d’alarme qui vous vaut une surveillance rapprochée.

Peut être que le fait d’envoyer un email à votre cousin Alphonse (ce prénom déjà en soi pouvant paraître suspect) pour lui signaler que vous allez bientôt réceptionné la bombe (qui est la meilleure amie de votre sœur) va vous cataloguer en ennemi n°1.

Et si j’ai une passion secrète pour les sucettes Chupa Chups, au point que j’aime leur créer des tenues hyper fashion au goût réglisse, un agent X a-t-il besoin de mater les photos que je diffuse à quelques initiés ?

Et si, pour préserver mon droit à déblatérer sur mes voisins, je décide de crypter les données échangées avec les commères du quartier, dois-je craindre le débarquement d’un commando qui va me demander où j’étais le 5 juillet 1997 à 21H03 ?

Passe encore que par le biais de ma carte bleue, tout un assortiment de cravates décortique mes achats et mes préférences afin de me larguer un arsenal publicitaire ;

passe encore que lorsque j’affiche publiquement mon statut en vacances, je préviens de gentils cambrioleurs de venir travailler chez moi ;

passe encore que lorsque je téléphone à ma cousine Cunégonde (ce prénom en soi sous-entend des parents à interner) 5 paires d’oreille se tendent pour savoir si elle va conclure bientôt avec Rodrigues (il hésite parce que son nom de famille est Porte) ;

mais ce que je ne tolère pas du tout c’est que ces oreilles soient américaines.

Quant à découvrir que je suis quelqu’un de potentiellement dangereux, autant que ces accusations viennent d’une langue où je pourrais me défendre. Que répondre à « I accuse you of having a mass destruction weapon » (c’est du google traduction, si ça se trouve je suis fichée maintenant comme faisant l’apologie des crimes contre l’humanité), parce que j’ai annoncé dans mon blog qu’à chaque machine à laver, c’est l’hécatombe dans mes chaussettes : un « yes » semble peu propice, un « no » un peu court, un « what else » trop fort de café, un « but it is a french production », complètement incroyable (et pourtant elle tourne !)…

Alors insurgeons nous de ces écoutes, non pas parce qu’on les découvre, mais parce qu’elles ne sont contenues dans aucune loi, sollicitées par aucun juge et soutenues par aucun devoir de protection (à l’insu de mon plein gré) contre je ne sais quelle menace, alors que les vraies victimes sont en Syrie et que personne n’entend leurs cris d’agonie.

Pour soutenir ce mouvement de protestation, je propose une action collective majeure :

le boycott des lecteurs !

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S’asseoir tue

 

Je viens d’apprendre que les personnes, restant assises la majorité du temps, vivent moins longtemps que celles qui s’étirent régulièrement vers la machine à café. Bon, j’avoue que je connaissais cette information avant qu’un article ne me remémore ma fin prématurée prochaine, mais je n’avais encore point eu l’heur d’aborder ce sujet dans ce blog, magnifique étalage de non-culture.

Des chercheurs (qui, à la fin de cette étude, ont tous démissionnés pour postuler à Pékin – Express) ont donc démontrer  que, si vous vous contentez  d’installer votre fessier sur un siège quelconque (l’étude ne précise pas si l’espérance de vie varie en fonction de la qualité de l’objet sur lequel vous posez votre postérité mais, si s’asseoir sur un fauteuil ergonomique moelleux au lieu d’un strapontin mal articulé, ne vous fait peut-être pas gagner 10 ans, cela vous fera paraître la journée moins longue), et ne suivez pas les préceptes, non sans fondement, qui vous exhortent à bouger, vous augmentez votre chance de ne pas croiser un chauffard, mais diminuez celle de décroiser vos jambes. Notez que les analyses ne se sont pas allongées sur  les individus qui passent la journée couchés, mais on peut supposer que les prostitués n’ont pas souhaité participer à la comparaison, se contentant de petites morts régulières. Quant à ceux qui ont le cul entre deux chaises, peut être ont-ils des chances de péter plus haut que les statistiques.

Le gouvernement a donc raison, dans l’intérêt de tous,  de promouvoir la politique de la chaise vide et, en ne remplaçant pas un fonctionnaire qui part à la retraite, vise en fait à éviter qu’un pauvre hère se damne en entrant dans une administration chaisière : tu es au chômage, mais en allant 30 mn chaque jour à Pôle emploi, tu vivras plus vieux.

Prenons mon cas personnel : je suis assise en moyenne 12 heures par jour (j’ai enlevé sciemment les minutes pratiquées sur le siège des toilettes, parce qu’alors un effort est fourni). Sachant que 30 mn de chaise enlève 1 seconde de vie, qu’il faut soustraire la pression des cuisses sur l’assise, au frottement des omoplates sur le dossier et multiplier par le nombre de cheveux tombés sur une journée, vous obtenez une femme aigrie avant l’âge.

A côté, prenez mon collègue : il passe, chaque jour, 3 heures dehors à manipuler des outils divers et encombrants, 1 heure à se plaindre de la douleur, 2 heures à discuter à droite et gauche sur la macro-économie de la météo capricieuse, 2 heures à être officiellement en course et officieusement on ne sait où, 3 heures à faire du travail au noir. Et vous obtenez un homme pressé de prendre sa retraite, pour profiter des années gagnées à brasser du vent.

Conclusion pour prolonger son temps porteur, plutôt que de se condamner sur la chaise à électricité statique, il vaut mieux mener une vie de bâton de chaise.

C’est bouger ou être éliminé !!!!

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Sex tu plais en été

Et voici notre troisième et dernier épisode estival :

 SEX :

(position du missionnaire)

 Celui qui est certainement le plus attendu, parce qu’en été, il n’y a pas un magasine qui ne fait son étalage en Une « Ce que les hommes pensent du cunnilingus », en supplément «Le guide des amours de vacances », en page conseil «  Comment se refaire un hymen ? », en bonus « Les 58 caresses les plus plébiscitées », en débat « Couple : qui souffre le plus pendant les règles ? », en hors série « L’abstinence est-elle tabou ? ». Parfois il est enrobé d’un semblant de culture « Freud et la peur de l’orgasme clitoridien », voire d’un travail de recherche exhaustif « Le sexe et les religions : prier est-il tromper ? », découpé en paragraphes du genre « la symbolique du lavage des pieds », « le nirvana et l’onanisme », « le hachisch comme viagra », « Le pouvoir de la rétention », « L’impératif de la reproduction et le conditionnel de la fidélité », « Les positions kasher», « La tentation de la séduction », « Le sex-toy : un blasphème »,etc.

Le sexe est donc à l’honneur en été : les épaules dénudées, les jupes tourbillonnantes, les abdomens poilus, les shorts rédhibitoires s’exposent et suscitent des vocations, même chez les plus endurcis (ou les plus ramollos). Les douches froides et les fragrances d’aisselles moites ne suffisent pas à éteindre le feu allumé par les visions de chair, les frottements de peau, les langues se faufilant entre les boules de glace. La température monte, la sève s’échauffe, les habits tombent et les corps s’attardent sur le canapé, trop fatigués pour oser mélanger leur sueur ruisselante, à peine émoustillés par le bruit de pet qu’émet le cuir à chaque fois qu’ils en décollent une fesse. De l’eau, de l’air… Echangerais enlacement torride contre une bise légère !

Pourtant, il est de notoriété publiquement libertaire que rien de telles que l’été, et ses vacances de complexes, pour collectionner les aventures inoubliables, comparer les plans dragues jetables, sauter sur tout ce qui flanche, sortir la panoplie du parfait branleur. Ainsi Sven beau blond à la musculature étudiée (par la science surtout) s’approche finement de Maïka, belle brune à la poitrine attestée 100% biodégradable :

–          Alors, poupée, on bronze ?

–          Non, je teste le nouveau revêtement Tefal pour voir si les lourdauds s’y accrochent.

 

Sven, fort peu dépité, jette alors son dévolu sur Patricia, à l’âge plus conciliant :

–          Il est bien ton livre ?

–          Je ne sais pas encore comment il se termine, mais toi, je sais avec qui tu ne vas pas commencer.

 

Sven, à peine dégonflé, s’assoit à côté de Pauline au physique moins sélectif :

–          Cela te dirait une p’tite pipe ?

–          Si elle est si petite que ça, laisse-la plutôt partir en fumée.

 

En été, les pores-ports-porcs se libèrent. Une étude scientifique a été menée pour savoir si les endorphines, hormones du plaisir, circulent mieux lorsque les yeux sont exorbités par l’apport de cuisses fraiches, si cet afflux supposé a un impact sur la croyance en sa valeur sexuelle et possède une influence sur la recherche d’une satisfaction immédiate. Les résultats sont concluants : plus la jupe est courte, plus l’individu croit qu’il est appelé à conquérir la lune ; plus la canette est bue avec lenteur et essuyée sur un torse nue, plus l’individu croit que les publicités racolent n’importe quoi.

 juste pour le plaisir

L’eau, le soleil, le sexe sont inséparables, sauf si vous habitez à la montagne et ne pouvez coucher que la lumière éteinte. Le fantasme ultime (enfin, peut être le vôtre, le mien serait plutôt de posséder un maillot de bain qui ne gonfle pas le ventre, ne ramène pas les épaules au niveau du nombril, ne rentre pas dans la raie des fesses, ne se roule pas en un truc informe quand on l’enlève mouillé, ne se moule pas sur un truc informe quand on le porte mouillé, ressemble à un costume de bibendum en fait et rende moche même les plus canons) est le surfeur (avant requin) qui tient  sa planche à se repasser les filles sous un bras, l’autre main au-dessus des yeux en train de scruter l’horizon, d’un air mystérieux, comme s’il attendait qu’Aphrodite surgisse des flots pour aller la rejoindre dans une danse nuptiale voluptueuse, lyriquement accompagnée par les  vibratos des vagues en poussée jouissive, alors qu’en fait il attend que la plage se vide pour pouvoir rentrer, son caleçon ayant craqué sous la pression de ses pensées obscènes.

Mais l’été ne dure. Aussi si vous n’avez ni sea, ni sun, ni sex, gardez au moins le goût du sel.

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Si le soleil se lève, il se couche

2ème épisode de notre édition estivale.

SUN :

Forcément il pleut.

Essayons de faire abstraction de cette réalité grisâtre, ou orange selon Météofrance. C’est amusant cette façon de découper la France, en fonction d’alertes au degré plus ou moins menaçant (le rouge représentant le summum du danger, comme le sait celui qui s’est approché trop prés d’un babouin), en suivant les pourtours dociles des départements, dont tant se mèlent de vouloir les supprimer.

J’écoutais radio bleu dernièrement (en vrai, je suis tombée par hasard sur radio bleu, à la recherche d’une fréquence digeste, n’en pouvant plus des auto-promos, des chansons multi-diffusées et des appels réitérés de gentils bienfaiteurs à destination des benêts salariés pour qu’ils profitent des généreuses opportunités offertes par le déblocage de la participation et de l’intéressement et de l’exploitation et je suis restée captive d’une émission vantant les mérites de la climatisation sur la qualité du lait des vaches : celles-ci ne sortent de l’étable que quelques minutes à la fraîche nocturne, puisque durant la journée, afin de leur épargner les tourments d’une oppressante chaleur, elles pouvent se reposer sur la paille tendrement alignée,  d’énormes ventilateurs, dont  la mesure est battu par un choeur de queues, soulevant gracieusement leurs franges, et remplissant leurs yeux de reconnaissance envers le fermier qui sait  qu’elles le valent bien), et durant le flash météo, nos larrons du remplissage entre deux animations rupestres alertaient leurs auditeurs (les autres devront donc se contenter de regarder le ciel) que 22 départements étaient en orange, mais aucun dans notre région, où pourtant, au moment où ils parlaient, des trombes d’eau dévalaient des toits, aveuglaient les conducteurs et effeuillaient des grands mères accrochées à leur parapluie. Cela les perturbait quelque peu, mais ils n’étaient pas payés pour remettre en question la météorologie, science pure s’il en est, et la géopolitique des frontières françaises. Si une fuite nucléaire a pu s’arrêter aux frontières françaises, un orage se doit de se déverser sur le territoire qui lui est dédié.

Pour en revenir au soleil, essayons également de nous éloigner de ses messages alarmants qui nous martélent, sur des ondes pourtant aussi nocives à la réflexion, les périlleux dangers des rayons ultra-violents manipulés par le super-ennemi coriace de l’éblouissement majeur si on n’est pas doté des supers-lunettes protectrices offertes gracieusement par Carglass, et les effets catastrophiques de  son arme favorite, la déshydratation qui s’attaque aux personnes les plus fragiles : les jeunes enfants et les ivrognes (les personnes âgées n’étant pas fragiles mais vieilles), dont le principal est la plainte prolongée qui surgit involontairement des bouches qui pourtant le réclamaient à grand cri lorsqu’il était absent (quelle force et quelle domination sur nos plus bas instincts !).

Parlons plutôt coucher de soleil embrasant l’horizon d’une flambée digne d’un barbecue, parlons lever de soleil embrasant l’horizon d’une flambée digne d’un coucher de soleil et même que, des fois, le photographe lui-même ne sait plus si l’astre majestueux se lève ou se couche, surtout qu’il n’a jamais su mettre son numérique à l’heure, s’étant contenté de vérifier que l’appareil était sur réglage automatique et d’incendier Instragram de clichés sur la beauté du monde qui nous entoure (doigts de pied en éventail, serviettes sur lesquelles le sable dessine un coeur, crabes souriants, nuages orangés, nuages violacés, mouettes rieuses, soleil se couchant ou se levant selon que la fête a commencé tôt ou a fini tard, têtes hagardes, parasol déployé, voile au vent, chapeau à l’ombre, cheveux au vent, maillot de bain deux pièces, glaçons dans un verre…. que de mystéres !).

Ah ! s’allonger au soleil, le corps englué d’une protection 50+ pour s’ouvrir à la chaleur inondant de bonheur un être habitué, tout le reste de l’année, à la  brulure du café au gobelet duquel il s’accroche pour se rappeler que, quoique dise son chef, il a le droit lui aussi à une place au soleil.

Ah ! toucher les regards incertains de l’adolescent qui passe et repasse à la recherche d’un mouvement qui révélera l’insondable et lui permettra de résoudre l’énigme de la lance de feu du niveau 5 de Crisper Fantom.

Ah ! admirer sa frêle carcasse se voilant d’un hâle bronzé, se gorgeant de vitamines, s’abreuvant de chaudes caresses, se gonflant sous les plateaux de fruits de mer et les cornets triple boules.

Ah ! sentir la sueur s’écouler dans les sillons de son front et dessiner des arabesques qui suivent le prolongement du nez et s’y écoule le temps que votre mari vous demande de vous moucher.

Ah ! le soleil et sa charitable bienfaisance.

Ah ! s’il n’y avait pas eu Cloclo pour transformer celui du lundi en une calamité musicale….

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The sea and the summer ou comment passer l’été

J’ouvre une édition spéciale été, parce que c’est l’été et que mon cerveau repose en paix.

L’été se résume à trois mots (ce n’est qu’un début de phrase, parce que je vous rassure, je ne sais pas résumer et je ne sais pas m’arrêter à trois mots, contrairement à mon mari qui stoppe toute initiative quand je lui assène un « pas ce soir ».) : sea, sex and sun (comme l’été, les étrangers affluent, je me mets à l’anglais pour être bien comprise dans le forfait : bed, breakfast and borring).

SEA :

j’habite une région qui se bat pour obtenir le TGV, et non la mer. Je me demande pourquoi, cela ferait pourtant venir les touristes à plus grande vitesse.

(non pas qu’obtenir que le TGV passe au milieu de nulle part, entre les vaches et les volcans, soit une mission impossible, mais ça occupe des élus qui pensent peut-être qu’un train, où les réservations sont obligatoires, où les places se payent plus chères et qui raccourcit le temps de lecture entrainant à grande flambée la fermeture des derniers relais H, va écarter les indigènes, insolvables et désespérés de trouver une place assise ou même couchée aux ordres d’un patron,  des gares luxueuses, occupés qu’ils seront à effectuer des pélérinages le long des voies rouillées qui les reliaient à la grande ville et qui leur rappelleront qu’un jour leur chemin était de faire.)

Le grand avantage de la mer (ou de l’océan, je ne veux pas être seaxiste), c’est que c’est de l’eau. Vous enlevez l’eau, plus personne ne s’y baigne.

Le désavantage, c’est que c’est salé et que c’est sale. Vous enlevez l’eau, vous avez une baleine sur votre table.

Un autre avantage, c’est que, quand vous êtes myope, et que, après avoir bu une tasse croupie et pleine de merde de poissons, de crustacées et autres énergumènes qui se sentent mieux soulagés qu’à la piscine, où l’eau se colore quand les sphincters ne se tiennent pas correctement (vous pensiez que c’était une légende et pourtant, lorsque dans une piscine vous vous trouvez confronté à un excrément anonyme, c’est branle-bas de combat, évacuation et désinfection, donnant à la scéne une teinte surréaliste de contamination bactériologique foudroyante ; à la mer, pas de changement chromatique sur votre scène bucolique, vous vous écartez et allez jouer plus loin), vous vous redressez, en éructant plus ou moins gracieusement, et ouvrez les yeux (en vous maudissant de n’avoir pu faire de même avec la bouche), vous vous mettez à crier au miracle ! parce que vous voyez clair. Ensuite, vous vous essuyez les yeux et vous ne voyez plus que des têtes indéterminées qui vous dévisagent et sont interpellées parce que vous êtes debout….

Oui, car sur la plage, la position requise est étendue, pour bronzer-cramer, lire-dormir, surveiller-oublier les enfants. A la rigueur, vous pouvez vous lever, si vous avez un ballon et êtes doté d’une plastique appréciable. Sinon, couchez et cachez ses bourrelets, qu’il est politiquement correct de dire que personne ne saurait voir, mais qui, pourtant, sont les sujets principaux de magasines qui vous supplient, au minimum, de choisir un maillot de bain affinant.

Et puis il y a le sable. Quel transport de se promener les pieds nus dans le sable, se laisser masser par cet abrasif qui vous déleste de votre corne usée par le port de chaussures à destruction massive de voûte plantaire, d’entendre le crépitement du sable se lovant sous vos plantes massives pour en mouler l’empreinte pour la postérité jusqu’à la nouvelle vague, de sentir craquer sous la force de vos talons les armures vides des coquillages rescapés des châteaux de sable, de sautiller nerveusement sur des algues dont on promeut les qualités nutritionnelle,s mais qui vous retourneraient bien un peu l’estomac, tandis que vous essayez d’échapper aux puces de mer et aux vendeurs de beignets. Ou il y a les galets. Et vous regrettez vos tongs (Ah que ne dirais-je sur les tongs, si je savais les porter. Mais après avoir battu le record de lancer, puis celui de contravention pour coups et blessures involontaires, j’ai décidé de m’en servir comme tue-mouches).

Le problème avec le sable, c’est qu’il ne sait pas rester sur plage et aime prolonger le goût de vos vacances jusque dans le doux murmure du dépanneur, qui vous annonce cérémonieusement que votre machine à laver a rendu l’âme, n’ayant pas survécu au supplice du silice.

Ne dit-on pas que faire l’amour à la plage, c’est comme tester du tampon jex sans être sûr que le résultat sera brillant.

Prochain épisode : the Sun (pour rester dans le domaine du lave vaisselle).

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Les vieux meurent aussi

L’hiver, nous nous soucions de la santé des pauvres SDF rigidifiés par le froid incontournable, l’été, nous nous préoccupons du confort des personnes cloitrées dans les coulisses de l’âge. Chaque canicule, nous avons le droit à un regard compatissant sur nos glorieux ancêtres, pourrissant dans leur urine rance, radotant sur la beauté de leur mari qui sait si bien encore charmer les asticots, suppliant, les yeux chassieux, l’aide- ménagère, d’arrêter de frotter avec tant de faveur la poignée de la porte, maudissant leurs enfants qui ne pensent qu’à l’héritage, le facteur qui n’apporte que des factures et les étrangers qui prennent leur place, à la caisse, le samedi matin.

Nous nous ébaubissons devant leur sourire édenté, si attendrissant qu’on les caresserait bien s’il n’y avait pas la bave aux lèvres et les poils au menton. Et voilà qu’ils parlent d’une voix crayante…et nous zappons parce que c’est l’heure de « Plus con pour un million ».

Bien sûr les conditions d’habitation dans les maisons de retraite sont inadmissibles toute l’année. Le rapporteur de la liberté sans ficelle les compare aux prisons ; même si dans ces dernières, les hébergés sont sur écoute, alors que dans les premières, ils sont sur prothèse auditive, la majorité n’a pas demandé à croupir ici et préféreraient se plaindre qu’ils ne mangent pas assez, plutôt qu’ils mangent mal. L’avantage cependant de la prison sur la maison de retraite, c’est qu’on a des chances d’en sortir vivant.

Cependant l’hiver, un enterrement cela distrait, alors que l’été, les gens ont quand même d’autres loisirs où vaquer.

Et puis, être enfermés dans un enclos surchauffé quand tout le monde se gèle, cela fait rire à éjecter les dentiers ; et on les sort pour les fêtes de fin d’année ou, pour ceux qui n’ont plus de famille, on leur offre un joli chapeau pointu.

Mais être séquestré en plein cagnard et supporter les récits de vacances de votre fille, ou de celle de votre voisine qui, en plus sourde comme un pot, a cru que sa benjamine lui racontait « avoir vu l’esprit de Tartempion à Tananarive qui figeait d’émoi, les censeurs avaient des idées de le saigner aussi il a demandé à l’Etat d’Asie l’asile », alors qu’elle  lui disait que « vu le prix de sa pension, n’arrivant plus à finir le mois, sa sœur et elle avaient décidé de se renseigner auprès de  « l’Euthanasie facile » », et qui depuis, toutes les 15 minutes,  vous demande si elle aussi peut demander elle – aussi l’asile auprès de l’Etat d’Asie, cela peut vous donner l’envie de passer dans l’anonymat protestataire des victimes de la canicule.

Ma grand-mère paternelle, après avoir semé la zizanie et broyé les derniers liens fraternels, s’est réfugiée dans une maison de retraite, tellement transparente dans ses procédés, qu’il suffisait d’analyser les miettes jonchant sa chambre pour savoir le menu de la semaine, et peut être celui qu’avait ingéré la pensionnaire précédente. Comme elle n’arrêtait pas de geindre et de réclamer la consolation divine et la bonne volonté d’un médecin capable de parjurer son serment, et comme sa voisine n’arrêtait pas de geindre que si le médecin ne venait pas l’achever illico, elle allait s’en chargeait elle-même, ils ont fait un échange et lui ont accolé une sourde qui répétait inlassablement sa demande d’asile à l’Etat d’Asie, pendant que ma grand-mère lui répondait inlassablement qu’elle ne demandait qu’un simple harakiri. Imaginez donc comme elles ont été ravies quand l’hospice a organisé une fête pour le nouvel an chinois ; un peu plus et ma grand-mère retrouvait la joie de vivre. Je vous rassure, la dépression a eu vite raison de ses dernières forces et aucun docteur, ni grosse chaleur, n’a été impliqué dans son décès. Ses enfants ont réussi à s’engueuler sur sa tombe, elle pouvait partir heureuse.

Ma grand-mère maternelle, tout à fait valide et lucide, vit encore chez elle et est toujours reliée à sa descendance. Chacun s’inquiète de sa santé, sans avoir à se justifier d’une canicule pour l’appeler. Bien sûr, certains profitent de la chaleur pour ne pas venir et l’entendre se plaindre de ce qu’elle n’a pas assez d’argent pour faire réparer la chaudière (mais assez pour garnir son estomac d’une tapisserie de médicaments qui donnerait une vie d’études à un chimiste spécialisé dans les effets occasionnés par des mélanges de molécules a priori incompatibles), alors que repose sur son compte courant, le salaire annuel d’un cadre commercial qui aurait touché, en prime, ses intéressements. Elle jongle encore avec les anciens francs et ses bas, rapiécés, ont trente ans. Son mari gérait tout et l’a maintenu dans l’ignorance de la finance, mais heureusement, il n’y a que le médecin pour s’en être rendu compte (elle est d’ailleurs sa seule cliente et il est parti aux Seychelles cet hiver).

Bref, les gens meurent de chaud, de froid, de faim, de guerre. Peut-être que pour s’assurer qu’ils ne le fassent pas d’une façon scandaleuse (comme de mourir de chaud en été), il faudrait ne plus inscrire les décès sur les registres, ne plus les comptabiliser et laisser ainsi chacun vivre éternellement pour l’Etat, qui pourrait alors s’attaquer au vrai sujet : que faire des vieux quand ils ne meurent pas.

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L’assouplissant sans lessive

Depuis un mois, je lave mon linge avec de l’assouplissant, non pas pour le rendre moins rèche ou plus doux, mais parce que je croyais que c’était de la lessive. Je ne m’en suis rendue compte qu’hier, en cédant aux sirènes des publicitaires qui étalent toute leur poésie sur un bidon d’un litre d’essence pure d’harmonie florale. Etais-je en manque de lecture (je venais pourtant de finir « les mystères d’Udolphe » où j’avais frissonner devant les mystères mais frémis devant l’histoire d’amour), ma machine à laver était-elle parvenue à atteindre mes synapses sensibles à l’essorage et à exprimer son intempérance, soupesais-je la fin d’un cycle et l’envie d’un renouveau ?

En fait, mes yeux se posérent sur la dialectique enrubannée d’emphase et d’extase, à la recherche du dosage conseillé pour le lavage de draps, et se choquèrent sur le mot « assouplissant« . Je relus les arguments, cherchant où les tombeurs de l’hyperbole avaient glissé les mots « rend votre linge plus propre », mais je ne butais que sur « inspiration », « exaltation », « évocation », « précaution » : ma lessive était belle et bien un assouplissant incapable d’éradiquer 99,99% des bactéries et de lutter contre les tâches les plus coriaces. Et mon linge s’en était pas rendu compte, alors que les décorateurs de l’emballage déconseillés fortement au produit de l’approcher sous peine de se rendre compte qu’il n’assouplissait que les barrières contre l’inflammation. Et mon linge était donc en danger et c’est pas grave, je l’ai enfermé pour une dernière lessive – assouplissant lui promettant de l’eau pour se rincer.

Ce matin, j’ai donc acheté de la lessive après m’être assurée attentivement des promesses parfumeuses et les propriétés enfumeuses. Trop d’infos tue l’info principale : ce que l’on attend d’un produit c’est qu’il réponde à nos besoins, non qu’il répande les frustrations littéraires de représentants déplaciers. Que m’importe si l’assouplissant est super concentré, s’il n’est pas capable de se condenser, comme il m’est indifférent de me souligner les senteurs subtiles du dentifrice Incisif ou le camaieu seyant du shampoing Casquedore ou le croquant moelleux et aérien du fromage Dictateur ou la saveur gouleyante incomparable du pain de mie Elleestoumacroute.

Ecrivez moi juste beurre et je ne tromperai plus en achetant de la crème figée dans une spendeur caramélisée à la modernité réfléchie pour satisfaire les femmes qui veulent tout et le meilleur ;

contentez-vous d’un gros Nutella et arrêtez de me vanter les mérites d’un petit déjeuner équilibré, à base d’huile de palme, d’exploitation cacaotière et d’envolée des étiquettes ;

cessez de me montrer des fruits appétissants à l’arome naturel sans conservateur de goût pour que je cesse de me désoler en découvrant sous l’opercule de mon yaourt quelques déchets de vergétures dédaignés par les merles au palais certain ;

appelez gel douche la sensation de fraicheur revivifiante, extraite d’une gousse de Kumla bana, connue pour ses propriétés de regénérescence antioxydante pulpeuse.

Mon linge vous en supplie : il ne veut pas seulement sentir une libération progressive de notes de frais et une évasion exotique d’avocats épicés, il ne veut même pas être blanc s’il est de couleur, ni rester éclatant s’il est de travail, il veut juste être porté, parfois sans souplesse et sans grâce, mais toujours avec confort.

machine à laver froissée

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